Comment est élu le Sénat ?
Le Sénat est composé de 348 sénateurs. Ils ne sont pas élus directement par le peuple mais sont élus au suffrage indirect. Ils sont élus par des grands électeurs.
Ces grands électeurs sont eux-mêmes des élus. Il y en a 162 000 au total. Ils regroupent les députés, les sénateurs (oui oui, ils votent pour les suivants), les conseillers régionaux et départementaux. Mais le gros des troupes, c’est les conseillers municipaux (95% des “grands électeurs”).
Plus une commune est peuplée , plus elle envoie de conseillers municipaux qui votent pour les sénateurs. Il faut savoir que les commune des plus de 30 000 habitants envoient, en plus des membres de leur Conseil municipal, un grand électeur par tranche de 800 habitants au-dessus du seuil de 30 000. Ca veut donc dire qu’une ville de 830 000 habitants envoie 1000 grands électeurs en plus des membres de son Conseil municipal. Concrètement, ça veut juste de dire que les groupes politiques qui composent le conseil municipal reçoivent x voix supplémentaires aux Sénatoriales selon le nombre de grands électeurs supplémentaires auquel a droit la commune.
Les élections sénatoriales ont lieu à l’échelle du département. Plus un département est peuplé, plus il élit de sénateurs. Les Alpes-de-Haute-Provence, peuplées de 160 000 âmes, envoient un sénateur au Sénat. Le Bas-Rhin (1.1 millions d’habitants) en envoie 5 et Paris (2.2 millions d’habitants) comptent 12 sénateurs.
Si le département est petit (en dessous de 500 000 hab) et qu’il élit moins au maximum 2 sénateurs, le scrutin est majoritaire à deux tours. Le candidat, ou le binôme de candidat qui a la majorité au 2ème tour des sénatoriales est élu sénateur. Si le département est plus peuplé (+ 500 000 hab) et élit au moins 3 sénateurs, c’est un scrutin proportionnel. Les grands électeurs votent pour des listes et le nombre de sièges au Sénat est réparti en fonction du pourcentage de voix recueillie par chacune des listes.
Dans tous les cas, les listes ou les noms proposés sont souvent des vieux élus, bien connectés aux notables politiques de leur département Normal, ce sont eux qui votent pour les sénateurs !
Le mandat des sénateurs est de 6 ans. Mais on renouvelle pas tout le Sénat d’un coup. Tous les 3 ans on renouvelle la moitié du Sénat. Ca fait que les changements de majorité au Sénat sont progressifs. Une grosse claque ou une grosse victoire aux municipales va pas changer d’un coup tout le Sénat, il restera une moitié de sénateurs en poste.
La sociologie des sénateurs
Si on regarde par exemple la sociologie de la dernière chambre en date, le Sénat de 2017, on voit que les sénateurs sont encore moins représentatifs des Français que les députés de l’Assemblée nationale.
Les sénateurs sont très très majoritairement, des hommes. Il n’y a que 29.2 % de femmes au Sénat – contre 39 % à l’Assemblée nationale.
Les sénateurs sont aussi plutôt âgés. Plus de la moitié d’entre eux, 53.8 % ont plus de 60 ans et 10.8 % des sénateurs ont plus de 70 ans. A l’Assemblée, moins de 20% des députés ont plus de 60 ans. L’âge moyen en France, c’est 42 ans. Les sénateurs sont donc, objectivement, plutôt âgés.
Les sénateurs viennent aussi de milieux aisés. Les stats du Sénat ne donnent pas les CSP (cadres, ouvriers, etc.), mais simplement les métiers d’origine. C’est pas top mais ça suffit pour voir qu’il y’a pas d’ouvriers, qu’il y a beaucoup de médecins, d’avocats, de prof. Il faut toutefois noter que le Sénat comporte aussi (et ça ça vient de l’ancrage local), un peu plus plus d’agriculteurs que l’Assemblée. Evidemment, ces agriculteurs, ce sont plutôt de gros agri que des petits éleveurs ou maraîchers.
Pour rappel, en France en 2020, les ouvriers et les employés forment 47% de la population, soit quasiment la moitié.
On peut donc conclure que, sociologiquement, le Sénat est encore moins représentatif de la France que l’Assemblée nationale. Le Sénat est plus masculin, aisé et vieux que la moyenne des Françaises et des Français et que la moyenne des députés.
Le Sénat a – presque – toujours été à droite
Politiquement, on observe la même tendance conservatrice. Déjà, faut savoir que depuis le début de la 5eme république en 1958, la majorité du Sénat a toujours été à droite, sauf pendant 3 ans.
Cette exception, cette parenthèse de 3 ans, elle a eu lieu entre 2011 et 2014. Là la majorité du Sénat était PS, de très très peu.
Pour observer cette omniprésence de la droite au Sénat, on vous suggère de jouer avec l’infographie au bas de cette article.
Le Président peut modifier la Constitution par référendum
La Constitution prévoit des conditions pour la modifier. On appelle ces modifications des révisions constitutionnelles
Une “révision constitutionnelle” peut être lancée par le Président ou par l’Assemblée nationale ou le Sénat). L’article 89 de la Constitution prévoit que le texte de la révision constitutionnelle doit être approuvée par la majorité du Sénat et par la majorité de l’Assemblée nationale. Ce texte approuvée par les deux chambres doit ensuite être “votés” : ou par le peuple (qui approuve ou désapprouve cette révision par référendum) ou par une majorité des 3/5 du Congrès (le Congrès réunit dans une même assemblée les députés et les sénateurs).
Dans tous les cas, l’article 89 prévoit que toute révision constitutionnelle doit d’abord recueillir l’approbation de la majorité des sénateurs. Sur ce point, le Sénat est donc l’égal de l’Assemblée nationale, il peut bloquer un texte de révision qui ne lui convient pas.
Seulement, le Président de la République dispose d’un autre outils pour réviser la Constitution : soumettre au peuple un projet de révision constitutionnelle directement par référendum en utilisant l’article 11 de la Constitution.
De Gaulle a utilisé cet article à deux reprises. D’abord en 62 pour introduire dans la Constitution l’élection du Président de la République au suffrage universel direct puis en 69; pour modifier le Sénat. Il a modifié la Constitution directement par référendum précisément pour contourner le pouvoir de blocage du Sénat que permettait l’article 89. Il existe donc des précédents constitutionnels prestigieux pour permettre de modifier la Constitution en se passant de l’accord des sénateurs.
Les propositions de Sénat citoyen
De nombreuses réflexions ont été menées pour réfléchir à remplacer le Sénat par un “Sénat citoyen”. En faire l’inventaire prendrait un temps fou – surtout si l’on prend en compte les travaux des nombreux groupes de “citoyens constituants” ou les expérimentations des Assemblées de gilets jaunes.
Cela dit, nous vous conseillons cet article publié par l’association “Sénat citoyen” dans le magazine Socialter. Il est assez complet et balaye bien les différentes hypothèses suggérées.
On ne résiste pas à l’idée de vous montrer le projet de Sénat citoyen que porte l’association du même nom.

On voit que, dans leur esprit, le Sénat citoyen serait tiré au sort parmi la population et aurait des pouvoirs très étendu. En plus de coécrire et covoter les lois, ce Sénat tiré au sort pourrait dissoudre l’Assemblée nationale, destituer le gouvernement et serait en lien permanent avec des Assemblée locale tirées au sort. Il pourrait même bloquer les nominations aux plus hauts postes de l’Etat.
On voit donc que des projets ambitieux existent pour démocratiser le Sénat.