Le Grand Remplacement - Osons Comprendre

Le Grand Remplacement

Vidéo accessible uniquement aux membres abonnés.

Je m'abonne
Chargement de la miniature...

La "fin de la France", un "génocide par substitution", la théorie du Grand Remplacement popularisée par Zemmour a de quoi inquiéter. Passons là à l'épreuve des faits, avec rigueur et honnêteté.

  • Commentaires
  • Points clés
  • Sources et références

Commentaires

Seuls les membres abonnés peuvent poster un commentaire.

Je m'abonne

Points clés

  • Le “Grand remplacement” est une théorie formulée pour la première fois par l’écrivain d’extrême droite Renaud Camus et popularisée, entre autres, par Eric Zemmour pour à présent irriguer intellectuellement toute l’extrême droite et une partie de la droite classique. L’idée de grand remplacement possède une dimension culturelle et religieuse – le remplacement d’une culture européenne chrétienne par une culture et une “civilisation islamique” – et une dimension ethnique ou raciale – le remplacement des blancs par des non blancs. Prenons cette idée au sérieux et examinons ce qu’elle vaut et regardons quelle proportion de la population française est immigrée ou descendante d’immigrés.

 

  • La France compte aujourd’hui, grosso modo, 10 % d’immigrés – de personnes nées étrangères à l’étranger – dont 3.6 % de naturalisés. Il y a aussi 10 % de descendants d’immigrés et 10 autres pourcent de petits-enfants d’immigrés. Il y a donc approximativement 30 % de la population française qui a un lien avec la migration sur 3 générations. Schématiquement, la France d’aujourd’hui c’est 70 % de gens qui n’ont aucun lien avec l’immigration sur trois générations et 30 % de gens qui ont un lien avec la migration.

 

  • De quels pays sont originaires ces 30 % de la population liés à la migration ? 14 d’entre eux viennent d’Europe, 10 du Maghreb ou de Turquie, 3 du reste de l’Afrique et 3 du reste du monde. Plus le lien avec la migration est ancien, plus on retrouve d’origines européennes et plus il est récent, plus la migration est lointaine. L’immigration extra-européenne qui effraie l’extrême droite concerne ainsi 16 % de la population française. Avec 84 % de la population est européenne ou “de souche”, on est donc loin d’un “grand remplacement”.

 

  • Évidemment, assigner à un enfant l’origine de son unique grand-parent immigré est problématique. Parmi les 16 % de la population liée à l’immigration extra-européenne, il y a de nombreux métisses. Le métissage continue aujourd’hui. Deux tiers des enfants d’immigrés en couple le sont avec un conjoint “de souche”, ni immigré ni enfant d’immigré. Plus on ajoute de générations, plus la population “issue de l’immigration” a des liens forts avec la population majoritaire.

 

  • Cela dit, si aujourd’hui, la proportion de personnes liées à l’immigration extra-européenne est relativement modeste à l’échelle du pays, on peut affirmer de manière certaine qu’elle va augmenter à l’avenir. D’abord en raison des 185 000 nouveaux immigrés extra-européens qu’accueille chaque année notre pays. Ce chiffre – auquel il faudrait retrancher les 60 000 immigrés extra-européens qui quittent le territoire – représente 0.27 % de la population française. Ensuite, les personnes liées à l’immigration extra-européenne étant plus jeunes, en moyenne, que la population française, leur proportion va s’accroître avec le temps. Enfin, la fécondité des immigrés et de leur descendants est un facteur important.

 

  • La fécondité des femmes immigrées extra-européennes est un sujet qui véhiculent de nombreux fantasmes. Déjà, il importe de savoir que la transition démographique progresse à vitesse grand V dans de nombreux pays d’Afrique ou d’Asie. Au Maghreb, au Bangladesh, en Turquie, les femmes ont autour de 2 enfants. Malgré cela, le taux de fécondité des femmes immigrées algériennes est 3.7. Comment les Algériennes immigrées en France peuvent-elles avoir plus d’un enfant de plus que les Algériennes habitant l’Algérie ? Ce paradoxe tient au fait que le taux de fécondité est un indicateur qui surestime grandement la fécondité des femmes immigrées. Pour elles, il faut retenir la “descendance finale” soit le nombre réel d’enfants qu’ont eu les femmes immigrées à l’issue de leur vie féconde. Les immigrées maghrébines nées dans les années 1960 ont déjà moins de 2,9 enfants. Malheureusement, on ne peut connaître la descendance finale des femmes plus jeunes qui n’ont pas encore fini leur vie féconde. Il est néanmoins certain que cet indicateur décroît fortement. Pour les deuxièmes générations, le débat est plié. En 2010, les descendantes d’immigrées maghrébines étaient déjà à 2,06 enfants par femme, quasiment au niveau de la population majoritaire à 1,86.

 

  • Regarder ce qu’on sait de l’origine des bébés qui naissent aujourd’hui nous donnera une indication de l’importance de l’immigration dans la natalité française. Les statistiques de l’INSEE nous apprennent qu’en 2019, 28 % des bébés qui naissent en France ont au moins un parent immigré extra européen, contre 18% il y a 20 ans. A ces bébés, il faudrait ajouter les enfants des descendants d’immigrés extra-européens qui représentaient, en 2006-2008, 7% des naissances. Il est donc raisonnable de penser qu’aujourd’hui entre 35 et 40 % des bébés sont liés à l’immigration extra-européenne sur deux générations.

 

  • Ces naissances sont le destin démographique de la France. Même si on pratique l’immigration zéro pendant 30 an, la France de 2050, 2070, 2100 sera beaucoup plus “colorée” et métissée que la France d’aujourd’hui. La France va se colorer, c’est un fait démographiquement établi. Un jour, les “Français de souche”, sans lien avec la migration extra-européenne sur non plus 3 mais plutôt 4 ou 5 générations, seront même minoritaires. Doit-on craindre cette “colorisation” inéluctable du peuple français ?

 

  • Rien est moins sûr. Avec la transition démographique, les Français “de souche” ne font plus assez d’enfants pour renouveler la population du pays. Sans les immigrés et leurs descendants, la France se viderait. On aurait déjà atteint le “point de bascule” démographique où les décès se mettent à excéder chaque années les naissances. Il y aurait déjà de moins en moins de Françaises et de Français.

 

  • Une France qui aurait refusé toute immigration extra européenne, c’est une France qui se dépeuple à vitesse accélérée suivant la trajectoire d’un pays riche, industrialisé : le Japon. Le Japon n’a jamais compté plus de 1.6% d’immigrés durant son histoire. Ce pays connaît un déficit de naissances continu et croissant depuis 2005 et se videra, d’ici quelques décennies, la moitié de sa population. Aujourd’hui déjà, le Japon discute de passer la retraite à 70 ans pour faire face au manque de jeunes et on imagine sans peine les tensions sociales qui résulteront d’un pays amputé de la moitié de sa population.

Sources et références

Les sources sont accessibles uniquement aux membres abonnés.

Je m'abonne

Bibliographie générale

 

Avant de commencer les sources et références de la vidéo, quelques recommandations bibliographiques pour les curieuses et les curieux. Il s’agit d’ouvrages d’historiens et de démographes universitaires de renom.

 

 

 

 

Le “Grand remplacement” aujourd’hui : immigrés et Français descendants d’immigrés en 2020

 

Pour connaître l’ampleur du “grand remplacement” éthnico-culturel de notre pays aujourd’hui, il faut regarder la proportion qu’occupent les personnes liées à l’immigration – et particulièrement l’immigration extra-européenne – dans notre pays.

 

Nous avons cherché à le faire en détaillant les origines migratoires sur 3 générations : les immigrés, les enfants d’immigrés et les petits-enfants d’immigrés. Gardons en tête qu’il suffit d’avoir un grand-parent sur 4 immigré pour être compté comme “petit-enfant d’immigré”.

 

Voici le visuel qui compile toutes ces infos. Détaillons ensemble les chiffres et les sources.

Pour connaître les immigrés – les personnes nées étrangères à l’étranger – en France aujourd’hui, il faut regarder les travaux de l’INSEE issus du recensement. Nous retenons la publication la plus récente “L’essentiel sur les immigrés et les étrangers” parue en janvier 2021.

 

La France comptait, en 2020, 6.831 millions de personnes immigrées soit 10.2 % de la population (que nous arrondissons à 10 bonhommes dans notre schéma).

Parmi ces 6.831 millions d’immigrés, 2.5 millions ont acquis la nationalité française. Un immigré vivant en France sur 3 est donc suffisamment intégré à la vie de notre pays pour en être devenu citoyen.

D’où viennent ces 6.831 millions d’immigrés ?

 

  • Selon l’INSEE, 2.201 millions d’immigrés (soit 32.2% des immigrés et 3.3 % de la population totale) sont d’origine européenne (UE, Royaume-Uni ou autres pays européens). Nous arrondissons ces immigrés européens à 3 bonhommes bleus dans notre schéma.
  • 2.245 millions d’immigrés (soit 32.9 % des immigrés et 3.3 % de la population générale) sont originaires du Maghreb (Algérie, Maroc, Tunisie) ou de Turquie. Nous arrondissons ces immigrés maghrébins ou turcs à 3 bonhommes verts dans notre schéma.
  • 1.247 millions d’immigrés viennent des autres pays d’Afrique (que nous nommons, par commodité, Afrique sub-saharienne). Ils représentent 18.2 % des immigrés et 1.9 % de la population totale que nous arrondissons à 2 bonhommes jaunes dans le schéma.
  • Il y a enfin 1.137 millions d’immigrés restants, originaires des autres pays du monde (principalement d’Asie). Ils représentent 16.6 % des immigrés et 1.7 % de la population générale que nous arrondissons à 2 bonhommes oranges dans notre schéma.

 

Passons maintenant aux enfants d’immigrés, la deuxième génération. Les infos les plus récentes les concernant sont aussi issues de l’enquête Emploi de l’INSEE et peuvent être consultées dans ce tableau de l’INED paru en juin 2021.

 

La France comptait, en 2020, 7.622 millions de personnes immigrées soit 11.3 % de la population (que nous arrondissons à 10 bonhommes dans notre schéma).

D’où sont originaires les parents de ces 7.622 millions de personnes enfants d’immigrés ? Notons que si les deux parents sont immigrés, c’est l’origine du père qui est retenue dans les statistiques de l’INSEE. On ne retient l’origine de la mère que dans les enquêtes sur l’éducation des enfants, la mère ayant en cette matière une plus grande influence que le père.

 

  • 3.063 millions sont des descendants de migrants européens. Cela représente 40.2 % des enfants d’immigrés et 4.6 % de la population totale que nous arrondissons à 4 bonhommes bleus dans notre schéma.
  • 2.867 millions sont descendants d’immigrés maghrébins ou turcs. Cela représente 37.6 % des enfants d’immigrés et 4.3 % de la population totale que nous arrondissons à 4 bonhommes verts dans notre schéma.
  • 929 000 sont descendants d’immigrés originaires du reste de l’Afrique soit 12.2 % des enfants d’immigrés et 1.4 % de la population totale que nous arrondissons à 1 bonhomme jaune dans notre schéma.
  • Enfin, 763 000 sont des descendants d’immigrés originaires des autres pays du monde (principalement l’Asie). Ils représentent 10 % des descendants d’immigrés et 1.1 % de la population totale que nous arrondissons à 1 bonhomme orange dans notre schéma.

 

Jusqu’à la deuxième génération, nous disposons de statistiques pour l’année 2020 et fiables issus du recensement ou des enquêtes de l’INSEE. Ce n’est pas le cas pour la 3ème génération, les petits-enfants d’immigrés. Il n’existe aucune statistique publique fiable sur cette troisième génération.

 

Pour compter ces personnes nous mobilisons une enquête ancienne de la démographe Michèle Tribalat “Une estimation des populations d’origine étrangère en France en 2011” parue en 2015 dans la revue Espace, populations, sociétés.

Cette démographe a essayé tant bien que mal de compter, à partir des enquêtes Emploi (2005) , Famille (2011) et EAR (auprès des particuliers – 2011) de l’INSEE, le nombre de petits-enfants d’immigrés selon leurs origines.

 

Son estimation souffre d’approximations méthodologiques impondérables.

Avec ces enquêtes, elle n’est parvenue à le faire que pour les adultes de moins de 60 ans en 2011. Les petits-enfants d’immigrés les plus âgés ne sont donc pas comptés par Michèle Tribalat.

Autre approximation impondérable, l’attribution d’une origine. Comment assigner une origine unique à entrer dans une tableau statistique à une personne qui peut très bien avoir des grands-parents immigrés de différents pays ? Il faut une règle de sélection des origines et cette règle sera nécessairement arbitraire.

 

La règle qu’utilise Michèle Tribalat  n’est pas donnée dans l’article universitaire. La démographe l’a communiquée aux journalistes de Check News – Libération à l’occasion d’un article de presse de 2018. Voici la citation de l’article.

Michèle Tribalat nous explique avoir mis en place une «hiérarchie des origines». Et de citer, dans l’ordre : Algérie, Maroc, Tunisie, Autre Afrique, Turquie, Italie, Espagne, Portugal, autre UE, autre pays d’origine. Cette hiérarchie s’appliquant aux parents, et aux grands-parents.

 

On remarque que Michèle Tribalat s’écarte des conventions retenues par l’INSEE. Au lieu de privilégier arbitrairement l’origine du père, elle privilégie, tout aussi arbitrairement, une origine. Un enfant de père italien et de mère tunisienne sera compté comme d’origine tunisienne par Tribalat alors que l’INSEE retient l’origine italienne. Idem, un Français qui aurait 3 grands-parents portugais et un grand-père marocain sera compté comme d’origine marocaine.

La règle de “hiérarchie des origines” qu’utilise Michèle Tribalat majore donc la perception de l’immigration africaine et minore la perception de l’immigration européenne chez les descendants d’immigrés.

Vous savez tout sur la méthodologie de Tribalat, voilà maintenant comment nous utilisons ces données de 2011 pour donner une approximation des descendants d’immigrés de 3ème génération.

Tribalat trouve 4.677 millions de descendants d’immigrés de – de 60 ans en 2011. Nous avons choisi – tout à fait arbitrairement et de manière indicative – d’augmenter ce total de moitié pour tenir compte à la fois de l’accroissement mécanique de leur population (les nouveaux enfants) et des + de 60 ans. Nous arrivons donc à un total – indicatif toujours – de 7 millions de petits-enfants d’immigrés en 2020 soit 10.4 % de la population (que nous arrondissons à 10 bonhommes dans notre schéma).

 

Pour déterminer l’origine de ces petits-enfants d’immigrés nous opérons comme suit. Tribalat estime que 77.5 % des 3ème génération sont d’origine européenne, mécaniquement, 22.5 % sont d’origine extra-européenne.

Nous choisissons de porter cette proportion à 30 % pour tenir compte des petits-enfants de l’immigration maghrébine des années 60-70. Nous attribuons l’ensemble de cette migration extra-européenne à la zone “Maghreb + Turquie” par commodité, les autres origines migratoires (Afrique sub-saharienne, Asie hors Turquie et Amériques) ne comptant que pour une proportion négligeable des petits-enfants d’immigrés.

A partir de ce raisonnement arbitraire et approximatif, nous inscrivons 7 bonhommes bleus et 3 bonhommes verts dans notre schéma.

Evidemment, les chiffres de la 3ème génération en 2020 sont donnés à titre indicatif, il faudra attendre fin 2022 et la parution des premiers résultats de l’enquête “Trajectoires et origines 2” (TeO2) de l’INSEE pour avoir des informations plus précises sur les petits-enfants d’immigrés et leurs origines.

 

Cela valide les trois phases migratoires qu’a connu notre pays.

Les années 1920, dans l’entre deux guerre, avec beaucoup d’Italiens et de Polonais.

Les années 50-70, pendant les 30 glorieuses, avec un mélange d’européens du sud – des Italiens, des Espagnols, des Portugais – et de maghrébins qui venaient des anciens protectorats ou départements français.

Les années 2000-2020 enfin, avec une immigration plus diversifiée ; toujours avec des Maghrébins et des Européens, mais avec aussi plus d’immigrés des pays de l’Afrique subsaharienne.

Ces 3 grands moments d’immigration en France au 20ème siècle nous donnent nos 30% d’habitants qui ont un lien avec l’immigration sur 3 générations.

 

 

Le métissage

 

Notre décomposition de la population française liée à l’immigration sur 3 générations selon les origines migratoires invisibilise le métissage. De nombreux enfants ou petits-enfants d’immigrés sont issus de couples mixtes, entre deux immigrés d’origines différentes ou entre immigrés et parents issus de la population générale (que nous nommerons parfois par commodité “natifs”).

Ainsi que nous l’enseigne une enquête de l’INSEE parue en 2017 “ « Être né en France d’un parent immigré”, 55 % des descendants d’immigrés étaient issus de couple mixte en 2015.

Cette situation concerne tout de même 5 à 6 bonhommes qui forment la seconde génération de notre schéma. C’est pas rien du tout et ça montre que nos catégories “durcissent” le rapport à la migration.

Cela varie un peu selon les origines : les descendants d’immigrés européens sont 65% à être issus d’un couple mixte alors qu’ils ne sont que 44% chez les descendants d’immigrés maghrébins et 39 % chez les seconde génération originaires du reste de l’Afrique.

Ce métissage est d’ailleurs toujours à l’œuvre aujourd’hui. La même enquête indique que 67 % des enfants d’immigrés de plus de 25 ans étant en couple au moment de l’enquête le sont avec un conjoint qui n’est lui-même ni immigré ni descendant d’immigré.

 

 

Combien de nouveaux immigrés ?

 

 

Aujourd’hui, si on retient les chiffres du dernier recensement de 2020 qui compte les immigrés installés dans notre pays, on remarque que 272 000 nouveaux immigrants se sont installés en France en 2019 dont 185 000 immigrés extra-européens (soit 0.27 % des 67 millions de Français de 2019).

Attention toutefois à ne pas extrapoler uniquement le chiffres des entrées, chaque année des immigrés quittent notre pays. Nous n’avons pas encore le chiffre précis pour 2019 mais vous pouvez voir que, ces dernières années, autour de 60 000 immigrés quittent notre pays annuellement.

 

 

Les immigrés et leurs descendants sont plus jeunes

 

La principale cause d’augmentation de la proportion en France des personnes liées à l’immigration extra-européenne n’est pas à chercher dans les flux, dans les entrées de nouveaux immigrés, mais plutôt dans les dynamiques démographiques internes de notre population.

 

D’abord, il faut savoir que les immigrés et leurs descendants d’origine extra-européenne sont plus jeunes que la population générale.

La part des jeunes de – de 24 ans est beaucoup plus forte chez eux, et celle des + de 55 ans est beaucoup plus faible.

Avec les années qui passent, les vieux – plus souvent blancs que les jeunes – vont mourir et mécaniquement, la population générale va se colorer.

La jeunesse des immigrés extra européens et de leurs descendants a une autre conséquence : ils auront des enfants. Et ces enfants, ils vont aussi rendre la population française de plus en plus colorée.

 

 

La fécondité des immigrés

 

Cette question est importante parce qu’on entend souvent que les immigrées maghrébins, turcs, ou d’Afrique subsaharienne enchaînent les enfants.

Est-ce vrai ?

Notons déjà que, dans les pays d’origine, la transition démographique est en cours.

En Tunisie, au Maroc, en Turquie,en Algérie, le taux de fécondité baisse depuis longtemps, et s’approche déjà de 2 aujourd’hui. La transition démographique est presque achevée. Il en va de même pour l’Inde, le Bangladesh, la Chine.

Au Sénégal et en Côte d’Ivoire en revanche, les deux premiers pays d’Afrique subsaharienne dans les migrations récentes, le taux de fécondité des femmes reste plus élevé.

La tendance demeure néanmoins claire et évidente : les femmes font de moins en moins d’enfants. La transition démographique est à l’œuvre !

 

La fécondité des femmes baisse dans les pays de départ et on retrouve cette baisse dans les pays d’arrivée, en France pour ce qui nous concerne.

Ici, il faut faire un point méthodologique sur la démographie des immigrés. Quand on s’intéresse à la fécondité des immigrées, la première intuition est de regarder les taux de fécondité, techniquement appelés “indicateurs conjoncturels de fécondité ».

Les données sont pour le moins étonnantes. Les femmes algériennes immigrées en France ont un ICF de 3.69 alors qu’au pays, en Algérie, l’indice conjoncturel de fécondité est inférieur, 3 enfants par femme en 2018 (page 3).

 

Cet étonnement tient au mode de calcul de l’indice conjoncturel de fécondité qui convient très mal aux immigrées.

L’indice conjoncturel de fécondité de l’année X est calculé en faisant comme si, 100 000 femmes de 15 ans, allaient avoir durant toute leurs vies fécondes de 15 à 55 ans, exactement le nombre de bébé qu’on retrouve à l’année X à chaque âge. Les 100 000 femmes auront 3 bébé à 15 ans, 12 à 16 ans, 19 à 17 ans et ainsi de suite jusqu’à nous donner un nombre total de bébé, qu’il n’y a plus qu’à diviser par 100 000 pour avoir l’indice conjoncturel de fécondité, le nombre d’enfant qu’aurait 1 femme hypothétique si elle suivait toute la carrière féconde de l’année X.

Si cette explication écrite n’est pas claire, je vous recommande vivement cette vidéo de l’INED qui explique et illustre très bien ce que je tente de mettre par écrit.

 

Ce calcul fonctionne très bien à l’échelle d’un pays. Compter, pour l’année 2018, le nombre de bébés des Françaises de 15 ans, 16 ans etc. fait sens puisque l’année 2018 mesure bien des Françaises à tous les âges de leur fécondité, on retrouve aussi bien des Françaises de 15 ans que des Françaises de 55 ans.

Ce n’est absolument pas le cas quand on calcule, en France, l’indice conjoncturel de fécondité, mettons, des “immigrées algériennes”.

Pour ce faire, on regarde combien d’enfants ont eu, l’année 2018, nos immigrées algériennes de 15 ans, de 16 ans, de 17 ans etc. et on reconstitue le nombre d’enfants qu’aurait une immigrée algérienne qui aurait passé toute sa vie féconde de 15 à 55 ans avec le profil d’enfant par âge de 2018.

 

Ce calcul surestime grandement la fécondité des femmes immigrées pour deux raisons.

La première : l’ICF ne compte pas toutes les femmes algériennes qui ont 15, 16, 17 ans , qui n’ont pas d’enfants, et qui migreront plus tard sur le territoire français. Beaucoup de femmes algériennes jeunes et sans enfants ne sont donc pas comptées dans l’ICF des immigrées algériennes en France parce qu’elles n’ont pas encore migré. L’ICF est donc majoré.

Ce défaut ne se pose évidemment pas lorsqu’on calcule l’ICF non d’immigrées mais de résidentes d’un grand pays. Ces femmes là sont comptées à tous les âges de leurs vies et non uniquement après la migration.

Cela pose un problème important parce que, et il s’agit là de la seconde raison qui rend le calcul de l’ICF bancal pour les immigrées, les immigrées sont particulièrement sous fécondes avant leur migration et sur fécondes après.

La sociologie de la migration enseigne, partout dans le monde, une constante : les immigrées font souvent leurs enfants une fois arrivées dans le pays de destination. Une immigrée algérienne arrivée en France à 29 ans attendra son arrivée pour enfanter et aura en moyenne, par rapport aux autres algériennes, beaucoup moins d’enfants avant ses 29 ans et beaucoup plus après cet âge.

On comprend donc pourquoi l’ICF des femmes immigrées est largement surestimé et peut même s’avérer supérieur à l’ICF du pays d’origine.

 

Cette faille méthodologique a été repérée en 2004 par le démographe français de l’INED Laurent Toulemon dans son article “Fertility among immigrant women: new data, a new approach” paru dans Population et sociétés.

A la suite de Toulemon, les démographes tentent d’autres méthodes pour mesurer la fécondité des femmes immigrées. Ils regardent particulièrement la descendance finale, le nombre réel d’enfants que les femmes ont, en moyenne, une fois leur vie féconde achevée.

Cet indicateur a une énorme qualité : il ne s’agit pas d’un calcul, il s’agit d’une mesure de la moyenne d’enfants effectivement mis au monde. Il a toutefois un défaut : il ne permet de mesurer la fécondité que des femmes de + de 55 ans ayant achevé leur vie féconde et, ainsi, ne donne une indication que de la fécondité “passée” des femmes.

Voici, tirée d’un article paru en 2019 dans Population et sociétés, la descendance finale des femmes natives, immigrées et particulièrement des femmes immigrées maghrébines.

Vous voyez ici le nombre d’enfants qu’ont eu les femmes immigrées maghrébines en France et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il s’effondre.

Les femmes nées au début des années 60, qui ont 60 ans aujourd’hui ont eu sur toute leur vie fertile 2.85 enfants en moyenne soit 2 de moins que leurs mères.

Il y a toutes les raisons de supposer que cette tendance s’est poursuivie et que la “descendance finale” des nouvelles générations d’immigrées maghrébines, celles qui aujourd’hui ont 30, 40, 50 ans, soit encore inférieure.

 

Il faut aussi considérer la fécondité des descendants d’immigrés extra-européens.

En France, en 2010, les Françaises de 2ème génération, avec des parents immigrés du Maghreb, avaient déjà 2,06 enfants par femme contre 1,86 pour les femmes de la population générale.

En une seule génération, le taux de fécondité des maghrébines de deuxième génération s’est aligné presque entièrement sur celui des femmes de la population générale. Et ces stats datent d’il y a déjà 10 ans.

Plus le temps passe, plus les musulmanes en France seront des musulmanes françaises de 2ème, 3ème, 4ème, 5ème génération.

Bref : des françaises comme les autres, avec le même nombre d’enfants .

 

Les naissances : combien de bébés d’origine extra-européenne aujourd’hui ?

 

Regardons ce qu’on sait de l’origine des bébés qui naissent aujourd’hui. Cette information nous donnera une indication de l’importance de l’immigration dans la natalité française.

Les statistiques de l’INSEE nous apprennent qu’en 2019, 28 % des bébés qui naissent en France ont AU MOINS un parent immigré extra européen, contre 18% il y a 20 ans.

Ces 28%, c’est les enfants de la première génération d’immigrés. Idéalement, il faudrait aussi inclure, les enfants des descendants d’immigrés de 2ème génération,

 

Malheureusement, nous ne disposons pas de chiffres récents pour ces bébés là. On sait simplement que, en 2006-2008 au moment de l’enquête Trajectoires et origines 1 de l’INSEE et INED (page 4), ils représentaient 7 % des naissances. Ces 7 % de bébés étaient très souvent – 5 des 7% –  issus de couples mixtes : un parent descendant d’immigré extra européen et un parent sans lien avec l’immigration.

On peut donc imaginer qu’en 2019 les 7% de bébés nés d’au moins un grand parent issus de l’immigration extra-européenne nous donnent un chiffre plancher. Si on applique aux bébés de seconde génération la même augmentation de bébés extra-européens que pour les enfants d’immigrés (23 % en 2008 —> 28% en 2019) on obtient une estimation haute de 12 % des bébés de 2019 enfants d’au moins un descendant d’immigré extra-européens.

Il pourrait donc y avoir entre 35 et 40 % des naissances de 2019 qui ont un lien avec l’immigration extra-européenne sur deux générations.

 

 

Le Grand renforcement : notre modèle contrefactuel

 

Sans les immigrés et leurs descendants, la France se viderait. Il y aurait de moins en moins de Françaises et de Français. Vous voyez ici l’évolution des naissances et des décès en France entre 1970 et 2020, et leur projection sur les 50 prochaines années.

Jusqu’à aujourd’hui, les naissances dépassent les décès, mais les deux se rapprochent. En 2019, il y a 140 000 naissances de + que de décès, mais c’est beaucoup moins important qu’en 2000, où l’écart était de 266 000.

Autrement dit, il y a plus de bébés que de cercueils aujourd’hui, mais plus pour longtemps ! Avec le vieillissement de la population, la France va bientôt voir ses décès dépasser les naissances. Dans d’autres pays riches, c’est déjà le cas depuis un moment. Dites-vous qu’en Allemagne, la bascule a eu lieu en 1972 !

Quand on regarde les projections de l’INSEE, on voit que pour nous, c’est vers 2035 que la démographie bascule.

A partir de 2035, on aura plus de décès que de naissances, et sans immigration nouvelle, notre pays commencera à perdre des habitants.

 

Ca c’est les prédictions actuelles, avec nos 16 bonhommes, nos 16% de la population liés à l’immigration extra européenne. Mais imaginons un instant la situation démographique de notre pays si nous n’avions pas eu d’immigration extra européenne, si nous avions suivi il y a des décennies les rêves d’immigration zéro du Front National et les rêves actuels des Zemmour et autres zélés du Grand remplacement.

 

Sans les immigrés extra européens et leurs descendants, où en serait-on exactement ? Difficile de le dire avec certitude. Aucun organisme de statistique ne produit des chiffres pour imaginer ce qu’aurait été la France “sans immigrés extra européens”.

Mais rien que pour vos beaux yeux, en exclusivité mondiale, on a élaboré un calcul “approximatif” pour avoir un ordre de grandeur de ce que seraient les naissances et les décès en France aujourd’hui sans nos “grands remplaçants”.

D’abord les naissances. De combien seraient-elles diminuées en 2019 sans immigrés et enfants d’immigrés extra-européens ?

Pour construire ce contrefactuel, nous sommes partis de la Table T37 Quater de l’INSEE qui détaille les naissances selon l’origine des parents en 2019 et de l’enquête TeO qui nous donnent les statistiques concernant la seconde génération pour les naissances de 2006-2008. On y voit que :

13.5 % des naissances avaient 2 parents immigrés extra-européens.

2 % des naissances avaient deux parents descendants d’immigrés extra-européens.

Ces 15.5 % de naissances n’auraient pas eu lieu sans immigration extra-européenne depuis des décennies.

 

Que faire des couples mixtes ? Combien de naissances avaient un parent immigré (ou descendant d’immigré) extra-européen et un parent sans lien avec la migration extra-européenne ?

Il n’est pas possible de retrancher purement et simplement ces naissances. Les parents “non liés à l’immigration extra-européenne” auraient tout de même fait des enfants.

Nous avons donc choisi de retrancher la moitié des naissances issues des couples mixtes de première ou seconde génération.

La moitié des 14 % de naissances de 2019 avec un seul parent immigré extra-européen.

La moitié des 5% d’enfants issus de couple mixte avec un seul parent descendant d’immigré extra-européen.

 

Nous obtenons donc une fourchette minimum de naissances qui, en 2019, n’auraient pas eu lieu si la France n’avait pas accepté d’immigrés extra-européens depuis plusieurs décennies.

13.5 + 2 + 7 + 2.5 = 25%

 

Nous avons donc retranché 25 % aux 753 000 naissances de 2019 données par l’INSEE dans sa projection démographique la plus récente.

Le point de départ de notre modèle contrefactuel de naissance était donc : 753 000 x 0.75 = 564 750 naissances en 2019.

Ensuite, pour tracer la suite de la courbe de naissances jusqu’à 2070 (en pointillée), nous sommes partis des projections démographiques de l’INSEE et avons appliqué ce coefficient de 0.75 pour tenir compte des naissances manquantes de 2019.

A partir de 2020, nous avons minoré ce coefficient de 0.33 points de pourcentage chaque année afin de tenir compte du poids toujours plus important des personnes liées à l’immigration extra-européenne dans les naissances.

Les projections de l’INSEE ont donc été multipliées par 0.75-0.0033 en 2020, de 0.75-0.0033 en 2021 et ainsi de suite pour obtenir la courbe des naissances en pointillée du graphique.

 

Voilà pour les naissances, passons maintenant au contrefactuel des décès.

Pour savoir quels décès de 2019 n’auraient pas eu lieu si notre pays n’avait pas accueilli d’immigrés extra-européens, nous nous sommes appuyés sur les statistiques de décès par origine en 2019 fournies par l’INSEE.

En 2019, 7.5 % des morts étaient des personnes nées dans un pays extra-européen. Ce chiffre inclut des personnes non-immigrées, des Français nés à l’étranger dont particulièrement les pieds noirs nés en Algérie française. Ces 7.5 % sont donc une estimation majorée.

Nous avons choisi de le retenir malgré tout pour notre contrefactuel approximatif. Nous avons jugé que la surestimation de ce chiffre liés notamment aux pieds noirs devait compenser les quelques descendants d’immigrés extra-européens morts en 2019.

Voici comment notre point de départ de 2019 : 613 294 * 0.925 = 566 915.

Ensuite, pour tracer la suite de la courbe de décès jusqu’à 2070 (en pointillée), nous sommes partis des projections démographiques de l’INSEE et avons appliqué ce coefficient de 0.925 pour tenir compte des décès manquants de 2019.

A partir de 2020, nous avons minoré ce coefficient de 0.2 points de pourcentage chaque année afin de tenir compte du poids toujours plus important des personnes liées à l’immigration extra-européenne dans les décès futurs.

Les projections de l’INSEE ont donc été multipliées par 0.925-0.002 en 2020, de 0.925-0.002 en 2021 et ainsi de suite pour obtenir la courbe des décès en pointillée du graphique.

 

Voilà le recette de notre modèle contrefactuelle proposant une France “Sans immigration extra-européenne”.

Ces projections de coin de table mais elles donnent la tendance. Sans l’immigration extra européenne des dernières décennies, on aurait déjà atteint aujourd’hui, le point de bascule où les décès dépassent les naissances.

 

Une France qui aurait refusé toute immigration extra-européenne se dépeuplerait à vitesse accélérée.

 

Japon : un modèle ?

 

Le Japon est un pays qui a choisi depuis longtemps d’avoir très peu d’immigrés. Selon les statistiques de la Banque mondiale, les immigrés n’ont jamais représenté davantage que 1.6 % de la population.

Le Japon a un déficit de naissances continu et croissant depuis 2005. En 2019, il y a eu 516 000 décès de plus que de naissances.

Résultat : le Japon – pays parfaitement préservé de tout “Grand remplacement” – avec son super taux de chômage et ses places vides en prison – c’est un pays qui va progressivement perdre la moitié de sa population selon les projections du bureau des statistiques japonais.

Une conséquence majeure de cette dynamique démographique catastrophique : le Japon vieillit à vitesse grand V.

Aujourd’hui déjà, 28.7 % des Japonais ont + de 65 ans, contre seulement 20.7 % des Français.

En 2070, ça sera 37.9% de japonais qui auront + de 65 ans, contre 28.9% en France – d’après les prévisions de l’INSEE sur la base de nos dynamiques actuelles.

Je vous laisse deviner quel pays peut garder l’espoir d’une retraite à peu près décente, et quel pays devra travailler après 70 ans.Juste avant le Covid, le Japon était en train de discuter le passage de l’âge légal de la retraite de 65 à 70 ans et de nombreux japonais travaillent déjà après 70 ans pour compléter leur pension. Pour l’anecdote, certains japonais âgés ont la vie tellement dur qu’ils font exprès de commettre des petits délits pour passer un moment en prison, nourris et au chaud.