Transition énergétique : mission impossible ? Critique de Fressoz - Osons Comprendre

Transition énergétique : mission impossible ? Critique de Fressoz

La transition énergétique est-elle un mythe ? Une arnaque ? Diminuer l'usage du pétrole, du gaz et du charbon pour rester vers les +2° de réchauffement, est-ce une chimère ? C'est la thèse de l'historien Jean-Baptiste Fressoz, qu'on présente et critique dans ce nouveau format.

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Points clés

  • L’historien des techniques Jean-Baptiste Fressoz défend, dans ses conférences publiques, qu’une transition énergétique est peu probable ou impossible parce qu’elle n’a jamais eu lieu par le passé (nous n’avons fait qu’empiler les énergies) et parce que les énergies sont en symbioses l’une avec l’autre. Si l’on a besoin de charbon (ou de pétrole) pour produire du pétrole (ou des énergies renouvelables) impossible de remplacer une énergie par une autre. Ces thèses fortes de Fressoz peuvent être critiquées ou, du moins, complémentées.

 

  • D’abord, le raisonnement de Fressoz est historiquement fallacieux. Ce n’est pas parce qu’une chose ne s’est pas produite dans le passé qu’elle ne se produira pas dans le futur. Cet argument vaut, a fortiori, pour les projets politiques inédits. Si personne, par le passé, n’a souhaité engager un transition énergétique hors des fossiles, il est fortement douteux de s’appuyer sur l’histoire pour invalider un tel projet.

 

  • Ensuite, l’historien ne mentionne jamais les transitions énergétiques locales qui se sont produites dans le passé. Quand la France a décidé, au sortir des chocs pétroliers des années 70, de diminuer sa dépendance au pétrole et au gaz en construisant des dizaines de réacteurs nucléaires, elle y est parvenue. Le Royaume-Uni a réussi à éliminer pétrole et charbon de sa production d’électricité, même l’Union Européenne s’engage sur ce chemin. Des transitions hors du secteurs électriques existent aussi. La Norvège est parvenue à diminuer de 20 % les émissions de CO2 de ses transports en seulement 5 ans !

 

  • Au-delà de ces exemples locaux, une transition énergétique globale est moins difficile à imaginer que ne le dépeint Fressoz, qui choisit de retenir des objectifs de réductions des émissions plus ambitieux que ceux du GIEC. Première raison, la transition démographique. Le XXè siècle a empilé les énergies en accueillant 6 milliards d’humains supplémentaires. Pas sûr que XXIè siècle, et les 2.5 humains supplémentaires qu’il accueillera la Terre d’ici à 2086, représente une tâche aussi ardue. Surtout que, depuis les années 80, la consommation d’énergie par personne augmente peu et est même parfaitement stable depuis 2010. Enfin, nous disposons aujourd’hui de technologies de décarbonation matures et peu chères. Tant le solaire que l’éolien ou les batteries de véhicules électriques ont connu des baisses de prix importantes qui conduisent aujourd’hui à des courbes d’adoption exponentielles.

 

  • Quant à la symbiose entre les énergies, si elle se vérifie pour la production d’acier et de ciment – qu’il est difficile (mais pas impossible) à décarboner – elle ne constitue pas un obstacle absolu pour réduire nos émissions. Si, pour décarboner quasi intégralement la production d’électricité, le transport hors aérien, et la chaleur des bâtiments résidentiels, commerciaux et industriels, il faut utiliser de l’acier et du ciment qui, eux, seront toujours produits à partir de fossiles, ce n’est peut-être pas le drame que décrit Fressoz. L’humanité sera déjà parvenue à éliminer deux tiers des émissions de gaz à effet de serre et 80% des émissions de CO2 mondiales. Pas si mal non ?

Sources et références

La pensée de Jean-Baptiste Fressoz

 

Jean-Baptiste Fressoz est un historien des techniques que vous avez pu voir dans cette vidéo du Média, joliment nommée, “transition piège à con ?”, dans cet entretien avec Olivier Berruyer sur le média Elucid, dans cette conférence à l’école des Ponts, dans le podcast Metabolism of Cities ou encore dans cet épisode de la chaîne d’entretiens Greenletter club qu’on vous recommande.

Nous nous permettons de vous renvoyer à la vidéo et aux entretiens de Fressoz ci-dessus pour vous familiariser avec la pensée que l’auteur développe dans ses conférences. Voici néanmoins les liens externes cités dans la première partie de la vidéo.

Si on regarde l’évolution de la part de chaque énergie dans l’énergie mondiale, on peut penser qu’il a eu un âge du bois, puis un âge du charbon, puis un âge du pétrole.

En 1850, 93 % de l’énergie mondiale venait du bois. En 2019 seulement 7%.

En 1910, 55 % de l’énergie venait du charbon. En 2019 c’est plus que 27%.

En 1974, 45% de l’énergie venait du pétrole. En 2019, c’est descendu à 33%. Le gaz et les énergies bas carbone commencent à prendre le relai.

 

Le problème, nous dit Fressoz, c’est que cette histoire est fictive. Les énergies ne se sont pas remplacées, elles se sont empilées. Pour comprendre ça, il faut regarder l’évolution de notre consommation d’énergie non pas en relatif, en pourcentage, mais en absolu. Combien on brûle de tonnes de bois, de charbon, de pétrole, etc. Et là, le tableau change radicalement.

Quand on regarde la quantité d’énergie consommée dans le monde on voit qu’on brûle aujourd’hui moitié plus de bois qu’en 1800, 5 fois plus de charbon qu’en 1910, 70% de pétrole en plus que dans les années 70. Au XXème siècle, notre consommation énergétique a explosé, et pour couvrir cette explosion, les énergies se sont ajoutées les unes aux autres, elles se sont empilées, additionnées.

 

Autre sujet développé par Fressoz, l’imbrication ou la symbiose entre énergies, particulièrement présente dans la production d’acier et de ciment. Le charbon est toujours aujourd’hui (2021) l’énergie reine de la production d’acier : il fournit encore 75 % (27/36) de la consommation énergétique des hauts fourneaux.

[ SOURCE : AIE, Iron and Steel Tracking Report, 2022 ]

 

Il n’y a pas que l’acier qui nécessite beaucoup de charbon, le béton – matériau omniprésent dans nos infrastructures routières et énergétiques –  l’utilise aussi comme énergie. Très récemment en 2016, le charbon a fourni 90 % de l’énergie utilisée dans les usines de ciment, le constituant de base du béton.  »

[ SOURCE : Global Cement, “Coal for cement : Present and future trends”, 2016 ]

 

En bon historien, Fressoz a retrouvé les premières utilisations du concept de transition énergétique. La première utilisation de “transition énergétique” viendrait de chercheurs en énergie nucléaire à Chicago qui avaient travaillé au projet Manhattan autour du prix Nobel de physique Enrico Fermi. Ils étaient préoccupés par la quantité d’énergie nécessaire pour soutenir l’augmentation de la population. Ils étudiaient déjà le réchauffement climatique causé par les énergies fossiles et croyaient qu’une “transition énergétique” vers le nucléaire pouvait résoudre les deux problèmes.

Le concept a ensuite été repris par Marion King Hubbert, le théoricien du pic pétrolier, qui a été recruté par l’Atomic Energy Commission pour, justement, faire la promotion du nucléaire comme solution à la fin des fossiles. Fressoz parle ici d’un graphe issu d’un des articles les plus célèbres de Hubbert “Nuclear Energy and the Fossil Fuels” où Hubbert fait clairement la promo des “surgénérateurs nucléaires” ou “nucléaire de 4ème génération” qui, contrairement aux réacteurs d’aujourd’hui, sont très peu contraints par les réserves limitées en uranium.

[ SOURCE : Hubbert, “Nuclear Energy and the Fossil Fuels”, 1956, Figure 29 p.53 ]

 

Critique : Des transitions énergétiques locales ont existé

 

Commençons par une question toute simple, question que Fressoz ne pose jamais parce qu’il construit tout son raisonnement à l’échelle mondiale : que se passe-t-il quand un pays veut diminuer son utilisation d’une énergie, quand il veut faire une “transition énergétique” ? De nombreux exemples existent pour répondre à cette question mais prenons le cas de la France qui, suite aux chocs pétroliers des années 1970 a entrepris de diminuer sa dépendance au pétrole.

 

Chez nous, en 1975, l’électricité était produite à 30% au pétrole. Et à 57% avec des énergies fossiles, en ajoutant le charbon et le gaz.

15 ans plus tard, en 1990, grâce au programme Messmer de construction rapide de centrales nucléaires, charbon, pétrole et gaz ne représentaient plus que 11% de notre production d’électricité. Le pétrole en particulier est tombé en 15 ans de 30 à 3% de notre production électrique.

Et si on passe des pourcentages aux quantités, on voit que qu’on est passé de 106,2 Twh d’électricité fossile en 1975 à 47,3 Twh en 1990. Une division par 2,3. Le truc marrant, c’est qu’en 1990, on produisait 2,3 fois plus d’électricité qu’en 1975. Autrement dit, on a produit 2,3 fois plus d’électricité avec 2,3 fois moins d’énergies fossiles.  On a augmenté massivement notre quantité d’électricité en diminuant massivement l’usage du charbon, du pétrole et du gaz. On a pas eu un empilement mais bien une substitution, une transition hors des fossiles. Merci l’atome.

Là vous vous dites peut-être : ok c’est super impressionnant, mais c’est juste pour l’électricité. Qu’est-ce qui se passe si on regarde toute l’énergie utilisée en France, avec l’essence des voitures, le charbon de l’industrie, le fioul et le gaz du chauffage, tout ça ? Bonne question.

On voit que la transition énergétique est un peu moins massive dans toute l’économie que dans l’électricité, mais qu’elle existe quand même. La consommation de charbon a été divisée par plus de 5, la consommation de pétrole a baissé d’un gros quart et celle des fossiles en général de 20%. OK, le gaz a pris le relais, mais réaliser ces baisses de conso globales dans une France métropolitaine qui compte quasi 30% d’habitants en plus aujourd’hui que dans les années 70s, c’est pas rien.

 

L’exemple de la France n’est pas isolé. Il y a 10 ans, la Grande Bretagne produisait encore 40% de son électricité au charbon. Aujourd’hui, elle s’en est débarrassée.

Dans l’Union Européenne, le recul des énergies fossiles dans l’électricité est moins fulgurant, mais c’est impressionnant aussi. On utilise 45 % de charbon en moins dans l’électricité en 2019 qu’en 2007. Une division par presque deux de la quantité de charbon dans l’électricité en 12 ans, c’est pas la transition la plus lente qui soit 🙂

Si vous voulez des exemples hors de l’électricité, vous pouvez aller du côté de la Norvège qui, entre 2014 et 2019, a baissé les émissions de CO2 de son transport de quasi 20 % (18.9%).

Comment ont-ils fait ? Ils ont taxé les voitures thermiques, favorisé les transports en commun, les voitures électriques et même les ferries électriques. Ces 20% de réduction en 5 ans ne sont donc que le début de la transition énergétique norvégienne dans la mobilité.

[ Pour en savoir plus : Climate Chance, “Norway – The progressive electrification of land and maritime transport”, 2019 et OCDE, “The Norwegian CO2-differentiated motor vehicle registration tax, an extended Cost-Benefit Analysis”, 2021 ]

 

Ces exemples nous montrent qu’une transition hors des fossiles est aujourd’hui possible quand on souhaite réellement la faire. Si on est exigeant, on pourrait se dire qu’il ne s’agit là que d’exemples locaux  – dans certains secteurs et certains pays seulement. Ça nous montre que des transitions énergétiques rapides sont possibles – ce que notre ami Fressoz se garde bien d’expliquer – mais ça ne nous prouve pas qu’on peut le faire assez vite et assez profondément au niveau mondial. Alors, est-ce qu’une transition globale est possible ? Et, surtout, assez rapidement pour contenir le réchauffement climatique autour de 2° ?

 

Critique : Peut-on réussir une transition énergétique pour limiter le changement climatique vers 2° ?

 

On touche là à un argument décisif de Fressoz : la transition énergétique est peut-être envisageable  mais pas du tout à l’échelle mondiale et au rythme nécessaire pour maintenir le climat autour des 2°.

Déjà, commençons par pointer une énorme erreur de lecture du rapport du GIEC. Il nous dit “on doit réduire nos émissions de CO2 de 40% en 2030 et atteindre la neutralité carbone en 2050 pour ne pas dépasser les fameux 2°” (ELUCID autour de 10”21), ces chiffres n’existent nulle part.
Dans le dernier rapport du GIEC, on voit que pour limiter le réchauffement à 2°, le “zéro émissions nettes” de CO2 doit être atteint en 2070. Le monde dispose donc de 20 ans de plus que ne le dit Fressoz pour atteindre la neutralité carbone.
[ SOURCE : GIEC, AR6 Synthesis Report – Policymakers Figures, Figure SPM.5, 2023 ]

Au lieu de devoir sortir des fossiles en 50 ans, Fressoz ne nous en donne que 30 ! En faisant ça, pas étonnant qu’il conclue que “la transition n’ira de toute façon pas assez vite”. Suite à un échange par email, Jean-Baptiste Fressoz a reconnu cette erreur. Le 0 CO2 net en 30 ans seulement, c’est pour les 1,5°, pas pour les 2°.

Cela dit, cette erreur de lecture n’invalide pas son raisonnement. Vers quel avenir énergétique nous emmènent les politiques actuelles des Etats ? Je ne vous parle pas des belles promesses à horizon 50 ans, mais des actions qui sont prises aujourd’hui.

D’après l’Agence internationale de l’énergie, si on s’en tient aux engagements actuels des Etats – en 2050 seul l’usage du charbon aura un décru d’un tiers dans le monde. Le pétrole et le gaz ne baisseront pas durant les 30 prochaines années.

Il faut tout de même savoir que  l’AIE a tendance à sous-estimer, année après années depuis 10 ans, la montée des énergies renouvelables. Les chiffres du graph ci-dessus présentent ainsi probablement une vision “pessimiste” ou “très prudente” des tendances actuelles. Il n’empêche,  quand on voit cette “transition” largement insuffisante, il y a de quoi être sceptique sur la capacité de notre monde industriel à se passer des fossiles.

 

Pour revenir à notre question, vous comprendrez que ce n’est certainement pas nous qui allons trancher si, oui ou non, la transition énergétique peut aller ou ira assez vite pour contenir le réchauffement autour de 2°. Cette question nous dépasse largement. Ce qu’on peut faire en revanche, c’est apporter quelques éléments que Fressoz tait mais qui permettent de mettre en perspective son propos.

 

D’abord, Fressoz ne nous dit jamais que l’évolution des besoins énergétiques que le monde a connu au cours du XXè siècle n’a rien à voir avec ce qu’on va connaître au XXIème siècle. De 1900 à 2021, on a multiplié par 13 nos besoins énergétiques mais on a fait ça en absorbant plus de 6 milliards de nouveaux êtres humains. De 2021 à 2100, enfin plutôt à 2086, année du pic de population selon les dernières projections de l’ONU, la Terre ne comptera “que” 2.5 milliards d’humains en plus.

Empiler les énergies a été nécessaire avec la croissance démographique très forte du siècle dernier, pas sûr que ce soit le cas avec une démographie beaucoup plus contrôlée au XXIème siècle. Cette transition démographique, dont on a parlé sur Osons Comprendre dans cette vidéo, est vraiment un facteur clé pour les questions environnementales, de ressources, de croissance, d’énergie, de climat.

Si on regarde la consommation d’énergie par personne, elle n’augmente qu’un petit peu depuis 1980 et est même stable depuis 2010.

Ça veut dire qu’aujourd’hui, la croissance de l’utilisation de l’énergie est bien plus tirée par la population qui augmente que par un mode de vie de plus en plus énergivore. Bref, la tâche “transition énergétique au XXIè siècle” est probablement moins complexe qu’au siècle dernier. Et la démographie ce n’est pas le seul facteur beaucoup plus favorable aujourd’hui.

 

Autre élément que Fressoz ne mentionne pas, l’humanité n’a jamais eu autant d’outils efficaces et matures pour remplacer effectivement les énergies fossiles. Qu’on pense aux panneaux solaires, aux éoliennes – sur terre comme sur mer – aux batteries des véhicules électriques, toutes ces technologies sont aujourd’hui beaucoup plus efficaces qu’il y a 10 ou 20 ans, beaucoup moins chères qu’il y a 10 ou 20 ans et, surprise, on en a jamais autant installé qu’aujourd’hui.

[ SOURCE : GIEC 2022, AR6 – WG3 “Mitigation of Climate Change”, Figure SPM.3, Full Report p.12 ou 25 du pdf ]

Au niveau mondial, quand on regarde les courbes d’installation pour toutes ces technologies, on voit de belles exponentielles. Et depuis le Covid, on sait qu’une courbe exponentielle, même quand ça part de bas, ça monte très très vite. Avec de telles technologies arrivées à maturité, la décarbonation de l’électricité ou des transports va s’accélérer fortement dans les prochaines années. Rappelons-nous l’exemple de la Norvège qui décarbonne son transport à vitesse grand V.

Démographie, technologies matures, vous avez là quelques éléments qui montrent que les obstacles à la transition énergétique sont moins importants que ne le dit Fressoz, Mais on a toujours pas touché le cœur d’un argument important de Fressoz : la symbiose des énergies. Peut-on désimbriquer assez vite les énergies bas carbones des énergies fossiles, ou est-ce que c’est une mission impossible ?

 

 

Critique :  Peut-on désimbriquer les énergies, sortir de la symbiose ?

 

Rappelez-vous, pour Fressoz, les énergies sont imbriquées les unes les autres. Pas de pétrole sans charbon et pas d’énergies renouvelables sans minerai et acier et donc sans pétrole ni charbon. Commençons par un argument important. Imaginons que Fressoz ait raison, et qu’il soit VRAIMENT impossible de produire dans les 40-50 prochaines années des panneaux solaires, des éoliennes, des centrales nucléaires, des voitures électriques ou des batteries, sans utiliser du pétrole dans les mines et du charbon ou du gaz fossile dans les usines à acier ou à ciment. Est-ce que ça condamnerait l’idée de transition énergétique ?

 

Bah non. Si toute l’électricité est bas carbone, si notre chauffage est bas carbone, si notre mobilité est bas carbone, si toute une partie de notre industrie utilise de l’électricité bas carbone, alors on élimine déjà une immense partie de notre utilisation actuelle des énergies fossiles. Certes, pas 100%. On peut toujours déplorer qu’une éolienne dont le béton a été produit au charbon n’est pas 100% sevrée des fossiles, que l’acier d’un vélo électrique a utilisé un peu de charbon pour sa fabrication, ou que du pétrole a été utilisé pour aller miner les éléments d’une batterie. Mais si on élimine en 30-40 ans le très gros morceau de notre utilisation actuelle du charbon, du pétrole et du gaz, on a déjà fait une grande partie du chemin. On serait déjà parvenu à éliminer 64 % des nos émissions de gaz à effet de serre et 80% de nos émissions de CO2. Pas si mal.

[ SOURCE : Climate Watch Data, “World GHG Emissions in 2019 – Sector / End Use / Gas”, Détails du calcul en source ]

Le discours de Fressoz insiste toujours sur les secteurs les plus difficiles à décarboner : la production d’acier et de ciment. Au passage, il omet l’aviation, on ne sait pas trop pourquoi.

 

Supprimer l’utilisation de charbon dans la production d’acier est difficile mais pas impossible. Des industriels suédois construisent une usine de production d’acier bas carbone s’appuyant sur l’électricité et l’hydrogène bas carbone. Le but : fournir l’acier des voitures et camions Volvo. Ce projet est en cours de développement. Même dans des secteurs très difficiles à décarboner, la “désimbrication des énergies fossiles” n’est peut-être pas impossible.

[ SOURCES : Projet HYBRIT porté par SSAB, LKAB et Vattenfall ]

Mais pour la production de ciment et l’aviation, c’est vrai que la décarbonation semble plus lointaine. Je vous mets un article en source pour le ciment et vous renvoie à nos vidéos sur l’avion pour comprendre pourquoi l’avion bas carbone n’est ni pour demain, ni pour après-demain.

En savoir plus : [ CIMENT ] Antunes et. al., “Alternative Clinker Technologies for Reducing Carbon Emissions in Cement Industry: A Critical Review”, 2022, Table 1

 

Pour nous, c’est important de comprendre que certains secteurs sont plus difficiles à sevrer des énergies fossiles. Fressoz a raison de les mentionner.

Mais pourquoi faire comme si ça valait pour tous les secteurs ? Pourquoi ne pas rappeler dans ses conférences qu’on peut produire de l’électricité sans utiliser d’énergies fossiles, et que certains pays le font déjà depuis longtemps ? Pourquoi ne pas rappeler qu’on peut aussi se chauffer sans utiliser d’énergies fossiles ? Pourquoi ne pas dire qu’à part dans l’aviation et le fret maritime, on peut développer rapidement une mobilité qui ne se base plus sur le carburant pétrole mais sur l’électrique ?